vendredi 1 mars 2013

AC's Coil Retrospective

COIL

“It just is”


Coil, c'est la transcendance. C'est cette capacité à déborder des a priori, à s'échapper de la réalité tout en y étant profondément, charnellement ancré. Pourquoi “Coil” ? Car l'omniprésence de cette forme en spirale dans la nature fait se rejoindre le minuscule, l'immense, formant un Tout. C'est le nombre d'Or, la globalité où se rejoignent science et magie. Le minutieux et l'erratique. Au reflet de la musique du projet. Car Coil est bien plus qu'un simple "groupe". C'est l'esprit d'une époque retranscrit d'une manière telle qu'il en devient universel. C'est un mal du siècle viable pour l'éternité humaine. C'est un non-sens, bancal, devenu logique par les sentiments.

“Are you ready to go now?”

Industriel sorti de la jambe de Psychic TV / Throbbing Gristle (Peter 'Sleazy' Christopherson ayant quitté PTV à ce moment), Cincarne alors les déboires de ce dernier fricotant avec Jhonn Balance. Sleazy, en quelque sorte, est la mouvance Industrielle. Cette dernière s'inspire des travaux musicaux de Pierre Henry, Schaeffer ou encore du cut-up pour créer une atmosphère dérangeante et insoutenable. C'est l'urgence, la rupture avec le présent et l’électrochoc qui dégénéreront plus tard en noise. La provocation jusqu'au-boutiste et la recréation d'une magie perdue se concrétisent par 'Thee Temple ov Psychick Youth' - groupuscule mené par ces précurseurs de l'indus, mélangeant art et magie moderne. Coil se veut adhérer à cette atmosphère d'art provocateur et de magick. Pourtant, Jhonn Balance va plus loin. Beaucoup plus loin.

“What was spoken, what was heard, what was seen, - beyond the shift


Il ressort de la musique de Coil cet étrange sentiment d'illusion, ce goût amer dans la bouche ; celui de la beauté. Que tout s'illumine ou se plonge dans le noir, on arrive presque à plonger sa main dans son torse et à en sortir cette flamme qui nous rappelle notre humanité. 'And darkly bright are bright in dark directed.' Si nous nous sommes dressés sur nos pattes arrières et que nous avons porté le feu, c'est maintenant dans nos entrailles qu'il brûle. La voix, omniprésente, nous rappelle sans cesse que nous marchons sur un fil, le seul nous séparant de la folie - et paré à craquer à tous moments. C'est d'ailleurs peut-être ce qui rapproche le plus Coil de la scène indus (mis à part sa capacité hors du commun à la subversivité). Les rythmiques tantôt dance tantôt ambient, éléctroniques ou venues de réels instruments, ne trouvent cohérence que par la voix et le timbre si spécifique, plus parlé que chanté, de J.Balance. Au-delà même du parlé, à la frontière de l'incantation, il invoque le subconscient [Interview de Jhonn Balance] repoussant alors les limites du COUM Transmissions par son seul organe vocal (Cosey Fanni Tutti en performance - qui un peu avant lui qui ne visait en fait qu'à choquer comme l'aurait fait un Sid Vicious adepte du fordisme). C'est l'escapade du moment, le maintenant magnifié. Les vagues et le feu industriel gris que Coil écharpe pour y retrouver l'humain. Pour y retrouver le magique. L'enfance. Mais forcément, cette dernière en réchappe quelque peu amochée. 

“God please fuck my mind for good”



La gentillesse et la générosité émanant de la majorité des disques est à un autre niveau de compréhension, de connaissance, que les valeurs communes - et effraye. La véritable transgression de Coil est le pardon - "donner au-delà". Réalisation totale de la magick d'Aleister Crowley en un sigil musical. La magie est morte en Europe, certes, mais continue de hanter les esprits industrialisés. C'est ce que le groupe a remis à jour, et relance par l'intermédiaire d'une machine (que voilà - ELpH), devenue un membre à part entière du projet - et remettant alors en question ce qu'est réellement un membre. Une machine peut elle aspirer au divin ? Emprunte de tant d'émotions, c'est quelque chose qui mérite d'être questionné.
Ils sont là, non pas individuellement, mais en osmose symbiotique, entre eux, captant une intégralité. Coil est la musique totale : projections (pas uniquement astrales), performers, déguisements, sons, manière de penser. Naturelle en ceci qu'elle dégage étrangeté, cruauté, munificence.


“Sometimes I hate myself. Sometimes I hurt myself. Sometimes I help myself.



À l'heure de l'explosion de la noise, des performances et de l'imagerie choc jusque dans le cinéma (1, 2, 3), Coil choisit un médium calme, à l'inverse du mur du son - cercle avec lequel il entretient pourtant d'étroits rapports. Plus récemment, il a inspiré divers groupes (la majorité de la scène indépendante actuelle, en vérité, qu'elle le sache ou non) dont un que je me dois de nommer : Murmuüre. Se revendiquant lui-même sous l'influence du projet, on reconnaîtra quelques clins d’œil (les mouches sur "Disincarnate" de Murmuüre nous rappellent les abeilles de "Finite Bees", ainsi que titre "Amethyst", sûrement en référence à l'Amethyst Deceiver, chanson phare de Coil). La manière de penser l'agencement sonore est aussi réellement proche, tout comme cette recherche d'un certaine conscience. Cette fâcherie définitive avec l'univers, mais cet appel à la réminiscence de ce qu'est l'Homme et sa place, cette capacité à laisser une trace étrange et par essence en contradiction avec elle-même qui FAIT justement tout l'humain, me rappelle ROME. Coil, tout comme ce groupe dans son genre, est testamentaire et noble d'âme. Totalement hors-normes, inexplicable, et si unique qu'il en devient l'incarnation de ce pourquoi l'homme est touchant : il est fou à lier.


Voici une archive de raretés contenant le backstage du concert à la Loco (Paris) où Jhonn Balance est dans toute sa splendeur, quatre chansons inédites dont une mixée par Autechre, une interview de 2004 et une dizaine de photos du groupe. TÉLÉCHARGER


Quelques albums clefs :
- Scatology (1984)
- Love's Secret Domain (1991)
- Musick to Play in the Dark 1 & 2 (1999)
- Moon's Milk (In Four Phases) (2001)
- The New Backwards (2008 - posthume)

EPs & Lives clefs :
- Panic / Tainted Love (1985)
- Themes for Derek Jarman's Blue (1993)
- Live Four (2003)
- ...and the ambulance died in his arms (2005)
- Absinthe (2006)

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