WRECK
and REFERENCE
AN
INTERVIEW (BUT NO FUN!)
On
Ambient Churches
AC : "What is your name?" *
Ignat:
Nous nous appelons Wreck and Reference. Nous sommes deux, chacun
avec notre propre nom, mais c'est une autre question.
AC
: "What is your quest?"
Ignat:
Je ne suis pas sur que nous en ayons vraiment une. Et toi, quelle est
ta quête ? Peut-être que ça (nous) mettrait sur le chemin pour
comprendre la notre.
Felix:
J'allais dire que notre quête était de trouver le Saint Graal, mais
je viens de me souvenir qu'on est censés rester énigmatiques dans
nos interviews.
AC
: "What is your favorite color?"
Ignat:
Le problème avec les couleurs c'est qu'elles distraient
les gens de l'essence de l'image. La couleur est souvent sans
contenu. C'est pourquoi je pense que je préfère quand les objets ne
sont pas colorés.
Felix:
#41383C
AC
: Que pouvez-vous nous dire sur Wreck and Reference ? J'ai vu
quelques photos de vos concerts... et vous jouez sans guitares !
Pourtant en écoutant votre nouvel album j'aurais juré qu'il y en
avait. Le son en lui-même est quelque chose de très important pour
vous, non ?
Vous
pourriez nous en dire un peu plus sur votre manière de composer ?
Ignat:
Plus de 60 ans de rock avec des guitares et tu en voudrais encore
plus ?! Les guitares sont chiantes ! Bien que j'ai écris quelques
chansons à la guitare, beaucoup sont le résultat de samples passés
dans un séquenceur, sur l'ordinateur. C'est une approche différente
du rock, et j'aimerais espérer, non-conforme.
Est-ce que ça marche ?
Est-ce que ça marche ?
Felix:
Nous avons beaucoup discutés de notre méthode de composition
et de nos efforts pour nous surpasser musicalement, mais pour être
honnête, je ne pense pas que je pourrais être content en écrivant
une chanson uniquement sur une guitare. Du coup, le procédé a
défini la musique, et vice versa.
AC
: Pour vous citer : "Il y a aussi un thème mis en avant qui est
le déterminisme. L'Humanité n'est pas dotée du libre arbitre
puisqu'elle est mûe par une inexorable séquence d’évènements
physiques et chimiques qui perpétuent l'organisme et la réalité
humaine dans les abysses – la fin de toute vie."
Vous
vous sentez proche du concept de vanité ? (je pense au tableau "Les
Ambassadeurs" de Hans Holbein). Une chose est sure : ce n'est
pas un nihilisme standard...
Ignat:
J'ai aimé ta question, et j'ai du faire quelques recherches pour y
répondre. Je pense que la principale différence entre la vanité de
Holbein (le crâne) et le nihilisme vers lequel nous tendons est que
la vanité découle d'une perspective d’existence, un genre
d'inutilité face à la mort. Le nihilisme auquel je me rattache
préfère une vision du monde comme d'un fonctionnement "physique"
(rationnel), qui en fait n'est pas tellement du nihilisme quand on y
pense. La réalité vue par l'homme est une interprétation
insignifiante d'une fraction d'un monde physique qui est en fait contrôlée par le mouvement des particules et des masses suivant des
règles établies, si on voulait donner du
crédit aux recherches. Notre compréhension se résume au grattage de
la surface des choses.
De
ce point de vue, l'existence humaine n'a pas de sens car elle est
dans une continuité de quelque chose de bien plus grand qu'elle,
notre esprit joue un peu le rôle d'un conduit
pour l'espace, et du coup il nous faut rejeter tout anthropocentrisme, volonté d'existence, mais aussi ce crâne (celui
de Holbein!, ndlr). Souviens-toi de la mort, ou pas. De toute manière
ça ne fait pas de différence. Si l'univers suit des règles qui
peuvent être approchées de manière mathématique,
cela ne peut que nous amener à la rationalisation. Selon moi, le
nihilisme c'est nier cette approche méthodique, c'est à dire l’éthique ; donc la croyance en la prédominance du rationnel
(physique) est contraire à toute croyance basée sur le "vrai"
nihilisme.
Felix
: On a pas encore trouvé de qualités analgésiantes dans notre
philosophie bâtarde. A bien des égards, notre musique est le résultat sonore de notre avenir arrivant à son terme, avec ce que
nous comprenons comme étant la vérité et les besoins corporels
qui nous tiraillent.
Puisque
nous sommes apparemment incapables d'apathie, on va continuer à
utiliser l'alcool et la fatigue post-concert comme nos méthodes
d'anesthésie préférées.
AC
: Votre nouvel album s'appelle "No Youth" (ou, plus précisément, le mot Youth est barré sur la pochette). Pourquoi ?
Ignat:
On a pris du LSD un jour, sur une pelouse bien verte avec le soleil
qui luisait. C'est à ce moment qu'on a écrit et enregistré Youth.
Je me suis demandé pourquoi, au milieu de la beauté et de la
nature, deux jeunes hommes en pleine 'floraison' avaient une si forte
tendance à se priver de tout ça en écrivant sur la dépression, le
fait que le bonheur est futile... mais aussi en le vivant réellement,
ce n'est pas juste un travail de fiction. Je n'ai toujours pas de
réponse à ta question. Mais je pensais que ça pourrait être bien
de faire un album qui expliquerait pourquoi notre premier disque
était si emplit de misère et de fatalisme, et pourquoi on tend
inévitablement vers ça. Je ne suis pas certain que nous l'ayons
vraiment terminé, mais Youth
est une
veritable excursion dans beaucoup d'aspects très personnels de ma
vie et de mon histoire, et touche aussi quelques questions de
société. De diverses choses qui nous privent de vivre et nous
mènent vers ce vide et cette depression.
Felix
: La prochaine fois W&R prendra plus d'acide, fera un album folk,
splittera et puis on se tuera.
AC
: Je serais bien curieux de vous voir jouer de la folk !
On peut donc dire queYouth
est à la fois un album sincère et personnel. Mais si je comprends
bien, c'est aussi très rationnel, pas de magie (magick), rien
d'autre que l'Absolu.
On peut donc dire que
Tout
ça me fait me demander une chose : vous considérez W&R comme
une entité musicale ? Ou un pur produit rationnel et mathématique ?
Comme toute chose en vérité.
Si
ce n'est plus de la musique à vos yeux, comment le décririez-vous ?
Felix:
On approche l'absurde ici. Il existe une infinité de manières pour
décrire Wreck & Reference, et je n'ai aucune autorité en la
matière ; là où la vérité git entre le ridicule et l'empirique.
Plutôt que d'essayer sans relâche de
cataloguer W&R, je préfère remercier le frisson et l'inconfort
que provoque l'indéfini. Il y tellement de choses pour lesquelles
j'aimerais dire que ce n'est pas moi, mais si nous revendiquons le
droit à une identité ou un but singulier, j'ai peur que nous
devions sacrifier beaucoup de notre liberté et de notre amusement
(coïncidence, c'est justement deux choses en lesquelles nous ne
croyons pas.)
AC
: Merci pour tout, j'espère qu'on vous reverra bientôt en ces
terres !
Je
vous laisse le mot de la fin.
...
PDF :
Traduction
par Ambient Churches, 2012
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