mercredi 11 avril 2012

Sghor - Maranathata

Sghor commence à officier dans les rangs noise / ambient dès 2004, où il n'est alors qu'un petit nom, noyé au milieu de l'immensité underground. Après huit disques dont un split, nous voilà en compagnie de Krzysztof M. pour une ballade des plus nostalgiques.

Il faut l'avouer, c'est avec ce disque que je découvre Sghor. Ici, cinq pistes pour cinquante minutes au total (je vous laisse faire le calcul du temps moyen par chanson). Un voyage qui ne s'avère donc pas court, mais pas non plus insurmontable.

Maranathata s'avère être doux, simple. Les quinze minutes de "The Happening" qui nous font entrer dans le disque sont on ne peut plus calmes et "faciles", mais elles ont le mérite d'être une bonne porte d'entrée - peut-être un peu longue et en marge de l'album ? Field-recording (qui nous suivra tout au long de l'album) de bruits nocturnes et longues plages de synthé pour un rendu éthéré et reposant.


Alors aux traits très "naturels", comme l'aurait fait un Apoptose, il est assez déconcertant de voir que le reste de l'album est axé bien plus moderne, si ce n'est futuriste. On en viendrait pratiquement à Future Sound Of London! Alors oui, vous allez me dire "halalah, Ω, tu abuses un peu, les styles n'ont rien à voir, arrête d'étaler ta culture!". Eh bien si. Il saute à l'oreille que les sonorités de The Happenning sont très différentes du reste de l'album, bien plus crissant, presque métallique et rouillé. Un joli portrait d'un avenir aussi pluvieux que livide. Alors oui, si, le lien avec FSOL est simple : ce son électronique et rond aux morbidesses futuristes et aux allures collage sonore. Ce qui est troublant, voir même dommage, c'est qu'on se sent en plus de ça tiraillé par une chanson qui résume ces cinquante minutes en... tout juste quatre. Coldworld : Winterreise.

L'univers de Sghor n'est pas au beau fix, et malheureusement son inspiration non plus. On sent une maîtrise du mix, et de l'immersion. On a envie de rentrer dedans. Mais après quinze minutes, c'est un choc de changer d'univers. Alors l'immersion perd de son charme, on se sent comme dans un jeu vidéo : il faut faire travailler sa cervelle. Les images ne viennent plus d'elles-mêmes, et le sentiment de nostalgie, pourtant bien parti pour durer, s’efface dans des sons trop urbains - qui ne collent pas au style d'ambient usité.
La production y est, et il est vrai qu'il est assez difficile de critiquer un disque bien fini. Mais il manque la patte, il manque l'inspiration. On s'emmerde. Les pistes ne se suivent pas, et on sent ici que Sghor lorgne vers autre chose.

 

Mais ce Maranathata est un album concept, et l'homme derrière celui-ci nous explique tout ici. Tout ceci lui serait arrivé, et cet album n'est en fait que l'enregistrement ce ce passage mystique de sa vie. Les grenouilles du début du disque, et le changement vers un son plus industriel ne sont en fait que les formes sonores de ce rêve (?), coïncidant ainsi à quelque chose. Conceptuel, certes, mais aussi très personnel. Car si pour Sghor, cet album a une réelle signification, pour nous autres, il est difficile de rentrer dans les pensées et de ressentir ce que lui a pu ressentir.
Un album qui a donc le mérite de se tenir, du moins dans l'idée, et d'être bien produit et plutôt bien enregistré.
Mais, sans mauvaise foi aucune, on ne rentre pas dedans. On s'y embête. Un rêve ou une révélation est quelque chose de personnel, tandis que la musique est elle, une chose partagée. Les rêves sont fouillis, la musique, elle se doit d'être "claire" si elle est s'étend sur une longue durée.
Dommage, donc...

 

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