La Nature se grave sur vinyle. Un langage, qui s'est mis à se rayer, cycliquement, en cercles concentriques, répéter les mêmes choses. Je survole les phases de l'abandon comme un loop la première neige avant d'aller se réfugier dans un tronc plein d'herbes et de branches, au chaud à l'abri des intempéries détraquées du Dehors. Les cendres du jardin d'Eden tombent, chaque hiver. Et les flocons tombent toujours sur ce visage, à ce moment entre la vie et la mort, dans une connaissance de cause troublante. L'univers s'invoque dans un mantra terrifiant, alors que l'homme renverse l'or au sol, c'est la naissance de l'automne. La terre devient dorure, la lumière drone et les balbutiements des enfants retentissent à tous les Âges.
L'innocence recommence à goutter. Rouge.
Il est le dernier à parler, car tout s'envole lentement, chacun est bouche bée si bien que l'on pourrait voir leurs œsophages. Il est le dernier, la voix pleine de reverb, à déclamer des suites de mots alors que la gravité a foutu le camp. Les icebergs montent au ciel et l'océan semble bouillonner. La poudreuse vient grossir les nuages placides et accélérés. Ma combinaison chauffe, le plastique me fond sur la peau, qu'ont-ils fait, qu'rrrrrrrrr... Les dernières visions et le vide enregistrés sur une platine vinyle portable, à destination des premières vies, un message comme un autre aux tardigrades, une bouteille au cosmique, tant que ce n'est pas un pavé dans la mare...
Remember that you have only one soul; that you have only one death to die; that you have only one life, which is short and has to be lived by you alone; and there is only one Glory, which is eternal. If you do this, there will be many things about which you care nothing.
(St. Theresa of Avila)
Dolores, après un To Die No More qui était le meilleur album de 2011, sort ce Mt. Loreto qui est d'ores et déjà le meilleur disque drone de cette année MMXIII. Toujours aussi cotonneux, mais aussi plus doom par moments, on reconnait la sonorité absolument pure du projet - une véritable identité sonore se fait sentir, jusqu'au traitement du son de la batterie. Un contact direct avec l'univers entier, la transcendance, la connaissance dans la recherche. Pour l'avoir écouté toute une nuit sans discontinuer, avec l'album précédent, je peux témoigner du fait que la lenteur globale de cet album doit être prise comme un rituel, une prise de risque - l'expérience d'un état de conscience altéré, une rencontre divine. Une nature, une spiritualité, mise en musique comme on le voit extrêmement rarement. Comme le dit lui-même l'artiste, c'est un moment parfaitement balancé entre la vie et la mort, une connexion à la perte. Mt. Loreto est une contemplation, un yantra.
Sortie prévue en tape chez Fern and Moss.
Album dédié à L.H. Smith.
Article dédié à R. de la Rosa.
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