On se souvient des déboires de Christs Nails dans les années '90. Mélange audacieux - si ce n'est prétentieux - de piano et de black metal. Cette voix criée, possédée, maladive accompagnée d'un instrument si voluptueux ("c'est fastueux, c'est fastueux!"), ma foi le résultat était fort étrange. Et fort peu convaincant.
On se souvient, car ça ne fait pas trop longtemps, des délires mystiques d'Occulto Mortualia. Ambiance étouffante, cette fois avec un genre de guitare sèche, mais toujours cette voix black en décalage. Ici encore, étrangeté, mais dans les grandes lignes... ratage.
Cette difficulté à capter l'essence du Black Metal pour la transposer dans une approche originale, plus d'un s'y est confronté. Plus d'un a raté.
Botanist est un one-man-band, de Black Metal - you guessed it - qui utilise au lieu des guitares et basses d'usage, différents instruments aux sonorités déroutantes. Comme... le Hammered Dulcimer. Oui oui, cet instrument étrange à cordes frappées, savant mélange de piano et de harpe. Du black metal ne reste que la voix et la batterie. Et l'ambiance infernale !
Aucun repos. Entre les vocaux shamaniques (Rhododendoom), les blasts sévèrement burnés (Gorechid) et le "piano" dément (Quercus Lamellosa), l'ennui est totalement impossible. Il faut dire que l'oreille est captivée par les sonorités totalement barrées qui se dégagent de l'album. Ma triste oreille européenne a pratiquement été choquée par ce son tout droit sorti du folklore le plus malsain et délirant que l'on puisse imaginer. Un rite de passage indien qui vire au bad trip dans Pandemonium!
Un approche très rituelle, proche de la nature - comme vous l'avez vu avec la cover et le nom des titres. Un hymne aux fleures fanées, aux plantes rampantes. Elles, qui d'un rien renaissent, couvrant béton, déserts et abysses. Leur beauté feinte, car emplies de suc venimeux. Leurs couleurs aguichantes et leur aptitude à attendrir. La plante : pratiquement synonyme de fragilité et de vanité. Mais n'est-ce pas elle qui, cruelle, recouvre ce qui l'entoure ? Ce baobab qui vous enveloppe de son bois mou, ces fougères qui vous blessent de leur feuillages de verre, ces rosiers, si beaux mais si piquants. La Nature est sans pitié, quelle que soit son apparence. Botanist, c'est cette personne qui collectionne, note, observe et reproduit la magnifique cruauté végétale. Une violence feutrée, un goût amer de sève dans la bouche. Le venin prend racines. Il se répand.
Superbe renouveau dans le monde Black Metal, The Suicide Tree et son jumeau A Rose From The Dead s'inscrivent assez bien dans la lignée vegan - weird qu'avait pris Book Of Sand (je vous revoie à ma chronique) tout en ayant une singularité pour le moins déstabilisante. Le genre de son que l'on reconnaît instantanément.
Et là où beaucoup échouèrent, Botanist s'en sort avec maestria. Véritable bonzaï sonore, bondage auditif à coup de lianes, sans jamais renier le black metal sauvage et indomptable, assaillant vos oreilles. Morceaux courts, tranchants, piquants comme autant de guêpes devenues folles.
Plus qu'une expérience musicale, c'est un véritable chef d’œuvre. Reste à savoir si vos oreilles y sont prêtes...
Pour acheter le magnifique double-LP
Une fois de plus, je vous invite (si si, j'insiste) à l'écoute
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